S’approcher du cœur du vivant conduit à faire une observation qui me parait essentielle, celle du changement. Une évidence, certes, mais qui demande à être précisée. A ce sujet, deux remarques et un enseignement pratique
L’adaptation au changement
Une caractéristique de la vie est de s’adapter en permanence, avec une incroyable inventivité, aux changements. Or si j’applique la technique de l’inversion, une autre vision surgit. La vie « est » changement, et c’est en fonction de quoi qu’elle se manifeste en permanence sous de nouvelles formes. Le changement ne saurait être une donnée avec laquelle la Vie aurait à composer ; ce serait dire que la Vie s’inscrirait dans un contexte plus large au sein duquel elle chercherait à s’épanouir le mieux possible en gérant les contraintes auxquelles elle serait confrontée ! Or la Vie, telle que je l’évoque, est bien cette force première, force créatrice, force divine, force première, elle est le changement. Difficile, et vain à mes yeux, de disserter davantage. Accepter le grand mystère qui échappe à notre compréhension limitée. La seule attitude intelligente est d’accepter cela et d’en tirer des enseignements pour gérer notre quotidien et lui donner du sens.
Chaos contre organisation
Les astrophysiciens en particulier ont vulgarisé l’image du chaos après big bang, de la poussière cosmique à partir de laquelle naissent les étoiles, image reprise en biologie pour évoquer la « soupe originelle » présente dans les océans et d’où ont pu émerger les formes organisées de vie sur terre. Le piège serait probablement d’opposer, de manière un peu simpliste, chaos et organisation. Encore une occasion, après la technique de l’inversion, de faire appel à une autre qui consiste à sortir de la dualité, sortir d’une vision manichéenne pour élargir notre « angle de vue » et chercher s’il n’y aurait pas, en fait, continuum (ensemble homogène d’éléments ) entre les deux. Le chaos pourrait alors être approché comme une étape organisée mais dont la complexité échappe à notre esprit cartésien d’homme. Cette hypothèse se trouve confirmée par bien des scientifiques qui affirment que les paramètres à l’oeuvre dans le big bang devaient avoir été réglés, ajustés, dosés avec une infinie précision pour permettre l’émergence de la vie telle que nous la connaissons, telle que nous l’incarnons ! Alors la phase de « chaos » n’a rien à voir avec le hasard et l’absence d’ordre, de structure, d’organisation ou d’harmonie ; il est profondément organisé sans que ce soit discernable par notre cerveau. Voyez les synonymes de chaos : incohérence, anarchie, désordre, éparpillement, désorganisation, imbroglio et celui que je privilégie : pagaille… Car ce terme évoque l’enseignement de Jeff Foster autour de la « divine pagaille » !
La prise en compte de l’étymologie est aussi une voie précieuse à suivre par les chercheurs de vérité, les chercheurs de sens, devrais-je dire.
Du grec ancien χάος, kháos qui désigne, dans la Genèse, l’état du monde (aussi appelé tohu-bohu en hébreu) avant sa création par Dieu.
Voilà qui conforte ce qui vient d’être suggéré : poussières cosmique, soupe primordiale, tout cela « existe » (étymologie : « être actuellement » « être debout », « être stable »), fait bien partie du début de la création dans laquelle nous nous trouvons, et ne saurait être qualifié de chaos antérieur en tant qu’absence d’organisation, même s’il nous est difficile de le mettre en équation… pour le moment. Le véritable chaos se situe « avant » la création de notre monde.
Or la notion même de création de notre monde est à moduler pour la confronter à l’éternel Vivant qui est en perpétuelle transformation. Avant, il n’y a pas « rien » ! Juste des formes de mondes qui nous resteront totalement inconnus.
En pratique
Ceci me conduit à retomber concrètement sur terre, ici et maintenant ! Pour résumer, les subtilités de vocabulaire autour de cette frontière séparant chaos et monde organisé reposent sur ce que l’homme est capable d’observer, d’expliquer. Et ce qui est vrai pour un astrophysicien s’exprimera différemment pour des non scientifiques dont je fais partie. La frontière entre organisé et pagaille est donc subjective, ce qui nous laisse un espace de liberté pour lui donner, en conscience, de manière constructive, la fonction nécessaire pour sortir de notre propre sentiment de chaos.
Alors, parlons de « notre » monde, en nous référant à la vie que nous souhaitons mettre en place et organiser si nous sommes dans une démarche de questionnement et de réorientation. Alors il y a là un formidable levier car l’entrée dans ce monde, dans cette nouvelle vie dépend beaucoup de notre regard. Je pense à ces personnes « cherchant leur voie » au cours des semaines de stage consacrées à ce thème. Le chaos souvent évoqué n’est plus une calamité mais une étape naturelle de la vie qui précède l’épiphanie (étymologie = Manifestation d’une réalité cachée ) du projet qu’elle s’impatiente de voir se manifester à travers nous. Trouver nos passions, nos talents, nos dons et les cultiver pleinement permet rétrospectivement de donner du sens à ce qui était ressenti comme chaos et permet d’autoriser l’étape suivante, celle de notre accomplissement ! Une telle perspective nous encourage à poursuivre notre cheminement en complicité avec les énergies et les mystères du Vivant ! Il ne s’agit plus de s’adapter au changement, imposé ou choisi, mais, infiniment mieux, de l’incarner en assumant notre redoutable et grandiose fonction de « co-créateur ».
Voilà ce que signifie l’expression « construire sa légende personnelle » utilisée par Paolo Coelho ou celle que je vous propose en comparant l’engagement de vivre pleinement sa vraie vie à une véritable odyssée cosmique (Voyage mouvementé, semé d’incidents variés, d’aventures )
Le passage du chaos à l’organisé est l’une des manifestations permettant au Vivant de rendre sensible à nos yeux la danse joyeuse qui l’anime ! Je vous invite à partir à la rencontre d’autres regards sur les mouvements du Vivant en évoquant rythmes, cycles et rituels