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Voir l’article rédigé par ailleurs sur le charme des porcelaines brisées évoquant le kintsugi « jointure en or » qui est une méthode japonaise de réparation des porcelaines ou céramiques brisées au moyen de laque saupoudrée de poudre d’or.
J’adore cette philosophie qui prend en compte le passé de l’objet, son histoire et donc les accidents éventuels qu’il a pu connaitre. Ces derniers ne signifient plus sa fin ou sa mise au rebut, mais un renouveau, le début d’un autre cycle et une continuité dans son utilisation. Il ne s’agit donc pas de cacher les réparations, mais de mettre celles-ci en avant.
C’est dans le même esprit que je salue une initiative artistique visant à réhabiliter les légumes trop souvent écartés, et donc gaspillés, au prétexte de petits défauts qui n’influent en rien sur leurs qualités gustatives, sanitaires ou nutritives. Carottes à deux jambes, aubergines biscornues, tomates difformes, fruits tuméfiés, … bizarres, ils sont bizarres aux yeux d’une société de consommation où l’apparence prévaut sur la qualité.
C’est pour lutter contre un tel gaspillage alimentaire portant sur des légumes « moches » que Sarah Phillips, entrepreneure américaine, a décidé de les valoriser via une série de photographies « Ugly Produce is Beautiful » (Les produits moches sont beaux), publiée sur Instagram.
Par le biais de la photographie, c’est une prise de conscience globale et mondiale que Sarah Philips veut susciter.
Ses photographies sont autant de natures mortes qui subliment fruits et légumes dans une mise en lumière et en couleurs particulièrement réussies. De véritables tableaux d’art dont la composition n’a rien à envier au peintre maniériste Arcimboldo …
Les porcelaines brisées, les légumes « moches » ou simplement non calibrés conduisent à nous interroger sur nos critères pour décider de ce qui est beau, de ce qui est bon. Nous y trouvons tous les stratagèmes du marketing s’appuyant sur une vision totalement déformée de la réalité de la vie véhiculée par le système de référence dans lequel nous sommes immergés. En prendre conscience est le premier pas vers plus de justesse dans nos appréciations sur ce qui nous entoure, sur ce que nous consommons et, au final, sur notre propre image que nous devrions présenter pour être reconnu comme « normal ».
Inspiré d’un article UP Magazine de mars 2018 pour le travail de Sarah Phillips,